Paul Gasnier remonte aux racines d'un drame personnel

C'était le 6 juin 2012. La mère de Paul Gasnier se rend à vélo au centre de yoga qu'elle vient d'ouvrir dans le quartier des pentes de la Croix Rousse. Elle est dans une toute petite rue quand un jeune sans permis et sous l'emprise du cannabis arrive au guidon d'une grosse cylindrée. Il tente une roue arrière à 80 km/h et il perd le contrôle de l'engin, il percute la cycliste qui tombe dans le coma et décède une semaine plus tard.

Treize ans après le drame, alors que ce phénomène des rodéos urbains est installé dans la rhétorique d'extrême droite, Paul Gasnier décide de revenir sur ce drame pour en comprendre les ressorts, sans complaisance ni haine : « L’insécurité, c’est un sujet qui rend fou et j'ai essayé de garder une ligne de crête sans trébucher d’un côté ou de l’autre. »

Comprendre, est-ce excuser ? « Non », répond catégoriquement Paul Gasnier. Mais c'est analyser un phénomène qui nous concerne collectivement. « Ce n’est pas parce que ce jeune est entièrement responsable de ce qu’il a fait qu’il nous est interdit de réfléchir à ce qui a armé son geste. »

Le récit que livre Paul Gasnier est impressionnant de mesure. Et c'est sans doute celle-ci qui a séduit les jurés du Prix Goncourt. De page en page, l'auteur nous pousse à interroger notre époque : « Je pense qu’il y a quelque chose dans le rodéo urbain qui a à voir avec le patriarcat, avec la virilité, avec le culte de ces machines qui font du bruit. » Il établit un parallèle entre les rodéos et les selfies : « Ce n’est pas un hasard si le phénomène rodéo urbain est apparu au même moment que le phénomène du selfie. »

‘‘La collision’’ de Paul Gasnier, publié chez Gallimard, est un des succès de la rentrée littéraire et l'auteur rejoint, aux côtés notamment de Lilia Hassaine et Panayotis Pascot, la liste de ses collègues de ‘‘Quotidien’’ qui sont entrés sur la scène littéraire avec talent.